REVUE SPIRITE JOURNAL D'ETUDES PSYCHOLOGIQUES - 1862

Allan Kardec

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Dissertations spirites

La Conquête de l'avenir.

(Groupe de Sainte-Gemme (Tarn). ‑ Médium, M. C…)

L'idée spirite va grandissant ; bientôt elle couvrira le sol français du nord au Midi, du levant au couchant. Des jalons sont plantés de distance en distance ; c'est vous qui êtes ces jalons ; c'est à vous que reviendra l'honneur d'avoir, sur nos conseils, tracé à vos frères la route à suivre. Réunissez-vous donc, non-seulement dans une pensée commune, mais aussi dans une commune action. Le temps de l'observation et des expériences est passé : on en est à l'application. Agissez et agissez sans crainte ; ne regardez jamais derrière vous ; ayez toujours au contraire les yeux fixés en avant ; contemplez le but et les obstacles qui vous en séparent ; si vous vous amusez à compter les pas, au lieu d'avancer rapidement, vous manquerez à la mission qui vous a été donnée. Prenez donc votre bâton de voyage ; ceignez vos reins, et en route ! mais ne partez pas seuls ; que toute l'armée spirite, cette avant-garde de la doctrine évangélique, se mette en marche en même temps. Unissez-vous, consultez-vous, et volez à la conquête de l'avenir.


Hippolyte Fortoul.



La Pentecôte.

(Groupe de Sainte-Gemme -Tarn).

L'esprit de Dieu souffle sur le monde pour y régénérer ses enfants ; si, comme au temps des apôtres, il ne se montre pas sous la forme de langues de feu, il n'en est pas moins réellement présent parmi vous. Priez donc avec ferveur le Tout-Puissant, afin qu'il daigne vous faire profiter de tous les avantages moraux, de tous les dons impérissables qu'il voulut bien alors verser sur la tête des apôtres du Christ. Demandez et vous recevrez, et rien de ce que vous demanderez de bon et d'utile pour votre avancement spirituel ne vous sera refusé. Priez donc, encore une fois, avec ferveur ; mais que ce soit votre cœur, et non vos lèvres, qui parle ; ou si vos lèvres s'agitent, qu'elles ne disent rien que votre cœur n'ait auparavant pensé. Le bonheur que vous ressentirez lorsque vous serez animés de l'esprit de Dieu est si grand, que vous ne sauriez vous en faire une idée. Il dépend de vous de l'obtenir, et, à dater de ce moment, vous considérerez les jours qu'il vous reste à vivre comme un morceau de route qu'il vous resterait à parcourir pour arriver à votre destination, et où vous devez trouver à la fin du jour votre souper et un gîte peur la nuit.

Mais que le peu d'importance que vous devez relativement attacher aux choses terrestres ne vous empêche pas de considérer vos devoirs matériels comme très sérieux ; vous commettriez une faute très grave aux yeux de Dieu, si vous ne vous livriez pas consciencieusement à vos travaux quotidiens. On ne doit rien mépriser de ce qui est sorti de la main du Créateur ; vous devez jouir, dans une certaine mesure, des biens matériels dont il vous a fait don ; votre devoir est de ne pas les garder pour vous, mais d'en faire part à ceux de vos frères à qui ces dons ont été refusés. Une conscience pure, une charité et une humilité sans bornes, voilà la meilleure des prières pour appeler à soi l'Esprit-Saint. C'est le véritable Veni Creator ; non que celui que l'on chante aux églises ne soit une prière qui sera exaucée toutes les fois qu'elle sera faite de bon cœur, mais, comme cela vous a été dit plusieurs fois, c'est le fond qui est tout, la forme peu de chose.

Demandez donc, par vos actes, que l'Esprit-Saint vienne vous visiter et verser dans votre âme cette force qui donne la foi pour surmonter les misères de l'existence terrestre, et pour tendre la main à ceux de vos frères que la faiblesse de leur esprit empêche de voir la lumière, sans laquelle vous ne pouvez que marcher à tâtons au risque de vous meurtrir contre tous les obstacles semés sur votre route. Le bonheur vrai, celui après lequel chacun de vous soupire, se trouve là ; chacun de vous l'a sous la main ; il n'a qu'à vouloir pour s'en saisir. Prenez aujourd'hui de bonnes et fermes résolutions, et l'Esprit de Dieu, soyez-en sûrs, ne vous fera pas défaut. Aimez votre prochain comme vous-mêmes pour l'amour de Dieu, et vous aurez dignement solennisé le jour où l'Esprit-Saint vint visiter les apôtres du Christianisme.


Hippolyte Fortoul.



Le Pardon.

(Société Spirite de Paris. ‑ Médium, M. A. Didier.)

Comment peut-on donc trouver en soi la force de pardonner ? La sublimité du pardon, c'est la mort du Christ sur le Golgotha ! Or, je vous ai déjà dit que Christ avait résumé dans sa vie toutes les angoisses et toutes les luttes humaines. Tous ceux qui méritaient le nom de chrétiens avant Jésus-Christ sont morts le pardon sur les lèvres : les défenseurs des libertés opprimées, les martyrs des vérités et des grandes causes ont tellement compris la hauteur et la sublimité de leur vie qu'ils n'ont pas failli au dernier moment, et qu'ils ont pardonné. Si le pardon d'Auguste n'est pas tout à fait historiquement sublime, l'Auguste de Corneille, le grand tragique, est maître de lui comme de l'univers, parce qu'il pardonne. Ah ! qu'ils sont mesquins et misérables, ceux qui possédaient le monde et qui ne pardonnaient pas ! Qu'il est grand, celui qui tenait dans l'avenir des siècles toutes les humanités spirituelles, et qui a pardonné ! Le pardon est une inspiration, souvent un conseil des Esprits. Malheur à ceux qui ferment leurs cœurs à cette voix : ils seront punis, comme dit l'Ecriture, car ils avaient des oreilles et ils n'ont point écouté ; Eh bien ! si vous voulez pardonner, si vous vous sentez faibles devant vous-mêmes, contemplez la mort du Christ. Voilà pourquoi le grand principe de la sagesse antique était avant tout de se connaître soi-même. Avant de se lancer dans la lutte, on apprenait aux athlètes, pour les jeux, pour les luttes grandioses, les moyens sûrs de vaincre. A côté, dans les lycées, Socrate apprenait qu'il y avait un Etre suprême, et, quelque temps après, des siècles avant Christ, il apprenait à la nation grecque entière à mourir et à pardonner. L'homme vicieux, bas et faible, ne pardonne pas ; l'homme habitué aux luttes personnelles, aux réflexions justes et saines, pardonne facilement.


Lamennais.



La Vengeance.

(Société Spirite de Paris. ‑ Méd., M. de B… M…)

La vengeance est douce au cœur, a dit le poète. Oh ! pauvres aveugles qui donnez un libre cours à la plus hideuse des passions, vous croyez faire mal à votre prochain quand vous lui portez vos coups, et vous ne sentez pas qu'ils se retournent contre vous-mêmes. Elle n'est pas un crime seulement, mais une absurde maladresse ; elle est, avec ses sœurs, la rancune, la haine, la jalousie, filles de l'orgueil, le moyen dont se servent les Esprits des ténèbres pour attirer à eux ceux qu'ils craignent de voir leur échapper ; c'est le plus infaillible instrument de perdition qui puisse être mis entre les mains des hommes par les ennemis qui s'acharnent à leur déchéance morale. Résistez, enfants de la terre, à ce coupable entraînement, et soyez assurés que si quelqu'un a mérité votre colère, ce ne sera pas dans l'éclat de votre rancune que vous trouverez le calme de votre conscience. Mettez entre les mains du Tout-Puissant le soin de prononcer sur vos droits et sur la justice de votre cause. Il y a dans la vengeance quelque chose d'impie et de dégradant pour l'Esprit.

Non, la vengeance n'est pas compatible avec la perfection ; tant qu'une âme en conserve le sentiment, elle reste dans les bas-fonds du monde des Esprits. Mais le vôtre ne sera pas plus que les autres l'éternel jouet de cette malheureuse passion ; et je puis l'assurer, l'abolition de la fausse notion de l'enfer éternel ou plutôt de la damnation éternelle, qui a été comme le prétexte, ou du moins comme une excuse intime des actes vindicatifs, sera l'aurore d'une ère nouvelle de tolérance et de mansuétude qui ne tardera pas à s'étendre jusqu'aux contrées privées de la vie morale. L'homme pouvait-il condamner la vengeance, alors qu'on lui présentait Dieu comme un Dieu jaloux, se vengeant lui-même par des tortures sans fin ? Cessez donc, ô hommes ! d'insulter la Divinité en lui prêtant vos plus ignobles passions. Alors vous serez, habitants de la terre, un peuple béni de Dieu. Faites en sorte, vous qui m'écoutez, qu'ayant affranchi votre âme de ce coupable et honteux mobile des actes les plus contraires à la charité, vous méritiez d'être admis dans l'enceinte sacrée dont la charité seule peut ouvrir les portes.

Pierre Ange, Esprit protecteur.

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